Comment est mort Ben Laden ?
A l’heure où la lutte contre le terrorisme connaît un net regain d’intensité, nous avons bien voulu revenir sur la plus grande traque de l’histoire. Laquelle traque a abouti à l’une des opérations les élaborées de toute l’histoire de l’armée américaine : l’assassinat de Ben Laden en 2011…
ça s’appelle un executive order, lorsque les forces spéciales américaines déploient une opération dans laquelle il leur est demandé de tuer physiquement un individu.Depuis la loi Reagan dans les années 80’, qui interdit aux soldats américains de tuer des ressortissants étrangers lors d’une opération commando, il n’y a que le président américain qui a le droit de donner cet ordre-là. Et c’est ce que Barack Obama a fait sans hésiter, le vendredi 29 avril, lorsque les services secrets l’ont assuré de la présence de Ben Laden dans une villa de la petite ville pakistanaise d’Abbotabad.
Tout commence en 2003 à la prison de Guantanamo, lorsque des détenus de Al Qaïda dénoncent un des messagers personnels de Ben Laden, et dont ils ne connaissent que le nom de guerre. Après plusieurs années de filature, la CIA finira par retrouver l’identité officielle de ce messager, pour finalement localiser sa résidence en août 2010 dans la ville militaire d’Abbotabad. Très vite, ce qui était au départ un espionnage transitoire s’avère rapidement être une trouvaille bien étrange. D’abord, la résidence du messager occupe une surface huit fois plus grande que les autres résidences du quartier. Ensuite, les barrières font 5 mètres de haut et sont équipées de barbelés. Puis, le ‘fort’ ne possède que deux entrées qui sont ultra-sécurisés. Sans oublier que le bâtiment a trois étages, et que pourtant aucune des fenêtres ne donne sur l’extérieur. Enfin, la résidence ne possède ni téléphone, ni internet, ses habitants sont très discrets, ils brûlent eux-mêmes leurs ordures au lieu de les confier aux éboueurs…
La suite on la connaît, plusieurs mois de traques nocturnes, de survols de drones, de planification de l’attaque, et surtout de silence. Car s’il faut bien avouer une chose, c’est que Barack Obama a rehaussé son image de commandant des armées sur ce coup-là. Lui que les américains jugeaient trop timide, voire timoré, pas assez courageux, a fait montre d’une patience sans borne, et d’une discrétion de tous les instants. Jusqu’au vendredi soir où, avec la certitude la présence de Ben Laden, il a donné l’ordre de mettre sur pied l’assaut. Et de capturer l’ennemi juré des États-Unis Mort ou Vif. Surtout mort !
Justement. S’il n’est pas clairement établi que le Pentagone voulait absolument abattre le leader d’Al-Qaïda, il est également avéré que la mort de ce dernier ne les embarrasse pas plus que ça. Un Ben Laden vivant aurait eu droit à des procès qui auraient perturbé les élections américaines de 2012, suscité des prises d’otages avec revendication de sa libération, provoqué des attentats suicides et des manifestations de foule exigeant qu’il soit rapidement libéré… Sans oublier que Guantanamo est en train d’être fermé, et que les américains n’aiment pas trop incarcérer les terroristes sur leur territoire.
Donc, Barack Obama en sort grandi, et ce 10 ans après les attentas du 11 septembre. Surtout, l’opération tombe à point nommé, à un moment où les mouvements de contestation sont légion dans le monde arabe. De quoi faire passer la pilule plus facilement. Surtout que dans le fond, ce que les populations de ces régions aimaient chez le fondamentaliste Ben Laden, ce n’était ni le terroriste ni l’intégriste, mais l’anti-américain qui osait défier l’arrogance des gouvernements successifs d’Outre-Atlantique.
Enfin, il reste des questions. Il reste à savoir pourquoi la télé pakistanaise s’est amusée à diffuser un photomontage d’un Ben Laden abattu de déflagrations en plein visage, avant de le retirer quelques heures après. Il reste à savoir pourquoi les américains s’amusent à ne montrer aucune photo d’un Ben Laden mort, silence qui risque d’attiser une nouvelle fois les théoriciens du complot, qui pensent déjà que cet assassinat n’est pas réel et qu’il s’agit là encore d’une autre fumisterie yankee.
Il reste à se demander pourquoi les États-Unis annoncent avoir immergé le corps sous mer, expliquant vouloir être en règle avec les rites religieux musulmans, que l’ennemi ce n’est pas l’islam mais le terrorisme, ratiocinant qu’il fallait éviter un mausolée ou un lieu de rassemblement à ce terroriste impardonnable, etc, mais des doutes subsistent quand même. Parce que dans la religion musulmane, on ne jette pas le corps à la mer, mais on le renvoie à la terre nourricière c’est-à dire qu’on l’enterre. Ensuite, parce qu’un ennemi public numéro un de cette envergure, on ne se débarrasse pas de son cadavre comme ça. On peut donc légitimement penser que les soldats américains ramèneront la dépouille mortuaire sur leur territoire, pour le garder dans un endroit quasiment inaccessible.
Et le terrorisme, continuera-t-il ? Bien sûr que oui. Ses organisations seront certainement affaiblies, voire légèrement démobilisées, mais il faut rappeler que Ben Laden avait cessé d’être le financier, le commandant de guerre, et l’idéologue depuis longtemps. La nébuleuse Al-Qaïda est une pieuvre sans queue ni tête, à tel point que ses différentes branches sont totalement indépendantes. En plus, on peut craindre une résurgence du sentiment anti-américain ou anti-occidental, conduisant à des actions criminelles de masse. Pas obligatoirement immédiatement, même dans les mois ou les années à venir…
Il reste des tas d’autres questions, mais on n’aura jamais réponse à tout. C’est à peine si on sait ce qui s’est exactement passé dans cette villa d’Abbotabad, où on nous dit que les tirs ont duré près de 40 minutes. C’est à peine. Et pourtant, 40 minutes ou pas, Ben Laden est finalement mort comme il l’avait toujours souhaité, en martyr. Mais avouons qu’on l’y a un peu forcé quand même !