5 octobre 2015

Au Cameroun, le spectacle commence par la Justice…

 

Quand je regarde l’actualité dans notre pays, j’ai souvent beaucoup de mal à me retrouver ! Que ce soit en football, je n’y comprends pas grand-chose. Que ce soit en musique, je suis complètement déconnecté.

En fait, j’ai compris qu’il faudrait que je me reconvertisse en juriste. Car croyez-moi, c’est le seul moyen de comprendre les divertissements qui se passent au Cameroun…

 

Joseph-Antoine Bell, dont la candidature à la tête de la FECAFOOT a été rejetée
Joseph-Antoine Bell, dont la candidature à la tête de la Fécafoot a été rejetée

 

LE SPORT CAMEROUNAIS COMMENCE PAR LA JUSTICE

Quand tu veux suivre notre football, on ne va jamais te parler des footballeurs ! On va te dire que le Comité de normalisation a déjà revisité les statuts. On va te dire que l’Assemblée générale a élu Tombi A Roko à la Fécafoot, mais que Abdourahmane Ahmadou est contestataire du processus électoral.

Avant ça, il y avait eu des plaintes que les gens avaient déposées au TAS (Tribunal arbitral du sport). Bien après, on avait incarcéré Iya Mohamed pour des affaires de malversation financière. Avant de m’intéresser à notre football camerounais, je ne savais même pas ce que c’est que la Chambre de conciliation et d’arbitrage…

LA CULTURE CAMEROUNAISE PASSE TOUJOURS PAR LA JUSTICE

Avant qu’on ne dégage Ama Tutu Muna, j’avais déjà appris beaucoup de choses sur le droit public. Par exemple, je ne savais qu’un simple ministre pouvait s’opposer à son premier ministre. Je ne savais pas que tu peux dissoudre une société comme la CMC, et puis la remplacer par la Socam pour faire les mêmes-mêmes choses.

Quand tu suis une émission de culture au Cameroun, le thème principal c’est toujours les droits d’auteur. Souvent c’est un compositeur qui se plaint parce qu’il n’a pas reçu sa part de guitare. Souvent c’est un humoriste qui n’est pas là pour faire rire, et qui se plaint que la culture ce n’est pas seulement la musique. Parfois c’est un ancien administrateur qui vient pour expliquer les droits mécaniques, les droits voisins, la gestion collective. Il y a même des avocats qui se battent pour qu’on ait enfin une salle de cinéma ici au Cameroun…

LA TÉLÉVISION CAMEROUNAISE, C’EST PARFOIS UNE AFFAIRE DE JUSTICE

Je sais qu’on a chassé Afrique Média parce que ses panélistes bavardaient un peu trop fort, mais je n’ai pas vraiment bien compris la suite.

Il paraît qu’ils avaient contesté la décision du CNC (Conseil national de la communication) de les suspendre, et que la police les avait expulsés manu militari. De toute façon même s’ils sont désormais en Guinée équatoriale ou bien ailleurs, la loi camerounaise est claire là-dessus : ils n’ont plus le droit d’émettre sur notre territoire !

Et puis ce n’est pas le seul problème, il y a aussi l’affaire de la carte de presse. Jusqu’aujourd’hui, les juristes se creusent la tête pour savoir ce qu’on doit mettre dans la définition d’un vrai journaliste

MÊME l’AMOUR EST PARFOIS UNE AFFAIRE DE JUSTICE

Pas toujours hein, et heureusement ! Mais je pense que si les Camerounais (es) faisaient valoir leurs droits, on serait de plus en en plus au tribunal pour des affaires de concupiscence…

En attendant, il y a toujours nos bonnes vieilles affaires de divorce. C’est là où tu comprends que l’expression « biens communs » est directement liée aux commissaires-priseurs. C’est là où tu te rappelles tout ce que le maire vous disait à la mairie, et que toi tu prenais pour une simple récitation.

En fait, j’ai toujours pensé que le seul bon moment dans une histoire d’amour, ce n’est que le commencement. Parce qu’après le début, on va seulement consulter les avocats et les huissiers. On va discuter tous les jours sur les affaires de l’héritage. On va chercher à savoir qui aura la garde des enfants. On va se renseigner sur les droits que possèdent les femmes en veuvage, et ainsi de suite.

L’amour est un spectacle qui est censé être joyeux, mais dans certains cas il se termine par le judiciaire !

 

c'est parfois le Premier Ministre qui prend les décisions sur notre football
C’est parfois le premier ministre qui prend les décisions sur notre football

 

AU CAMEROUN, LA JUSTICE EST PARFOIS LE PLUS GRAND DES SPECTACLES

Donc je regrette un peu d’avoir fait informatique à l’université, au lieu de choisir le droit comme tout le monde. Car dorénavant je suis largué, je suis dépassé, je suis mis à côté de la plaque. Je n’arrive même pas à comprendre la législation qui réglemente l’activité des câbleurs…

Pour écouter de la bonne musique camerounaise, il faut d’abord savoir si Ndedi Eyango est un Américain ou bien un Camerounais.

Pour connaître le meilleur joueur de notre championnat de football, il faut comprendre pourquoi on a rejeté la candidature de Joseph-Antoine Bell.

Pour payer les primes de nos sportifs et de nos artistes, payer les droits des retraités et payer les militaires de la Minusca, c’est toujours une décision qui appartient à notre ministère de la Justice.

Et au final, les vrais acteurs sont devenus de simples pions dans leur propre pays. Ce ne sont pas des footballeurs qui gèrent notre football. Ce ne sont pas des artistes qui gèrent notre culture. Et comme dans presque tous les domaines, ce sont toujours les juristes à qui on accorde le dernier mot.

Et c’est normal, puisqu’ils tiennent leur jurisprudence avec les comportements de notre chef de l’État !

 

Ecclésiaste DEUDJUI

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