23 avril 2018

J’aurai le syndrome de Stockholm

Il y a deux bandits qui m’ont agressé l’autre jour là-bas vers Makèpè-Missokè. Et pendant que l’un d’eux me serrait la gorge, il y a son complice qui me défigurait avec des coups de poings, il a même presque failli me démolir la mâchoire.

Mais vous savez quoi ? Je n’arrive même pas à les détester…

 

Le syndrome de Stockholm peut forcer une victime à aimer son bourreau
Source: Pinterest /CC0

 

C’est quoi le syndrome de Stockholm ?

Pour ceux qui ne sont pas aussi âgés que moi, sachez que c’est en août 1973 qu’on a diagnostiqué ce syndrome. Deux cambrioleurs avaient braqué une banque de Stockholm (Suède) pendant six jours, et avaient séquestré quatre employés en otage.

On a constaté qu’après leur libération, les otages en question avaient manifesté de la « sympathie » et de l’empathie pour leurs bourreaux ! Ils les avaient même défendus devant la police. Ils ont refusé de témoigner contre ces derniers au tribunal. Ils leur ont ensuite rendu visite en prison. Et le pire du pire, c’est qu’il y a même une employée qui avait développé une relation sentimentale amoureuse avec Jan Erik Olsson, alors que ce dernier s’était pourtant révélé comme étant le plus dangereux de ses deux tortionnaires…

 

Pourquoi je ne déteste pas mes agresseurs ?

Pour revenir au Cameroun à mon cas, disons que je ne suis pas près de tomber amoureux de mes deux agresseurs (il faudrait que je sois un homosexuel pour cela). Mais quand même, quand je suis retourné sur les lieux de mon agression le lendemain matin vers les 6h30, j’ai trouvé qu’ils avaient emballé mes chaussures neuves dans un sachet en plastique. Ils avaient aussi fouillé vidé mon portefeuille mais ils avaient quand même pris la peine de remettre ma carte d’identité à l’intérieur, ainsi que les clés de ma chambre.

Et ce qui fait en sorte que je ne les déteste plus, c’est qu’ils ont mis tout ça en route de façon que hein, même si je suis un aveugle hein, je vais voir qu’ils n’avaient pas du tout envie que je me sépare de mes nouvelles chaussures ainsi que de ma nouvelle carte d’identité

 

ce sont les petits qui donnent le Pouvoir aux grands
Ce sont les petites gens qui donnent leur pouvoir à leurs dirigeants. Source: steemit production / CC-BY

 

Qu’est-ce que je pensais des bandits auparavant ?

Avant mon agression de l’autre jour, j’avais déjà atteint un niveau où je me moquais de l’avis la vie de tous les bandits qu’il y a ici au Cameroun ! Et cette aversion avait commencé à Bafoussam en 2003, à cause de mes habits que j’avais séchés à la véranda. Des énergumènes avaient escaladé notre barrière en pleine nuit et avaient forcé notre porte (sans succès, heureusement), mais ils étaient quand même repartis avec mon nouveau survêtement que mon grand frère venait tout juste de m’offrir…

Après cet épisode, j’ai habité à la Nouvelle Route 7ème à Bépanda en 2006, et je voyais comment les bandits cambriolaient les maisons des gens presque tous les jours ! Et j’avais peur. Je voyais comment les braqueurs de Bonabéri sont capables de te poignarder en se souriant, et en te laissant comme un cadavre ! Et même si depuis l’autre jour j’ai quand même un peu changé d’avis à cause de mes deux agresseurs de Makèpè-Missokè, je dois reconnaître que quand on lynchait publiquement un bandit de Village, de Déido ou encore de Bonamoussadi devant mes yeux, eh bien moi je regardais toujours ces scènes macabres-là avec une de ces indifférences !

 

Pourquoi y a-t-il  des bandits au Cameroun ?

Je crois que c’est même cela la vraie question que nous devrions d’abord nous poser. Parce que si j’étais le Président de la République du Cameroun depuis 1982, j’irais utiliser ces braqueurs-là plutôt comme des militaires dans les unités d’élite. J’appellerais les cerveaux de ces gangs, et je les introduirais dans les services de renseignement.

Si j’étais même seulement un simple petit maire dans notre pays-ci, ou alors un simple Chargé de la culture comme mon ami Pierre La Paix Ndamè, j’irais me battre pour que les Camerounais continuent à se battre sans jamais chercher à les déranger. Parce que même si c’est vrai que les malfrats ne disparaîtront jamais de ce monde, je pense que nos dirigeants – et leurs acolytes – ont beaucoup fait pour qu’il y ait une démultiplication du nombre de gangsters qu’il y a ici au Cameroun.

 

tenue du RDPC avec Paul Biya
Les militants du RDPC sont victimes du syndrome de Stockholm. Crédit: chateaunews.com /CC-BY

 

J’aurai bientôt le syndrome de Stockholm

Et donc pendant que le premier bandit voulait presque m’étrangler, il y a son complice qui m’enchaînait avec les coups de poings, il a même presque failli me bousiller toute la mâchoire.

Mais vous savez quoi ? Je n’ai même pas un peu envie de vouloir commencer à les détester…

 

J’aurai le syndrome de Stockholm ! Parce que chaque fois que des Camerounais me braquent, ils font toujours tout et tout pour que je ne décède pas pendant la bagarre, et ils ne me poignardent jamais à des endroits qui pourraient me coûter le souffle de la vie.

J’aurai bientôt le syndrome de Stockholm ! Parce que quand on m’avait cambriolé l’année surpassée par exemple, les voleurs étaient venus déposer mon acte de naissance juste devant l’entrée de notre portail.

J’ai même déjà attrapé le syndrome de Stockholm, parce que j’ai compris que tous mes agresseurs font ce « travail » là parce que le Cameroun est devenu un pays vraiment très difficile.

 

Alors quand quelqu’un prend la peine de risquer sa vie alors que j’ai crié « Au voleur ! Au voleur ! », quand quelqu’un s’arrange à arracher mon téléphone portable mais à me restituer quand même mes pièces les plus importantes, quand quelqu’un dépose tout ceci sur mon chemin de telle manière qu’il est certain que je ne vais pas manquer de pouvoir récupérer toutes mes affaires, je n’ai surtout pas envie de le détester ou même tout simplement de le haïr.

Et c’est pour ça que j’aurai aussi bientôt le syndrome de notre Cameroun.

 

Ecclésiaste DEUDJUI, j’ai déjà le syndrome de Douala

WhatsApp: (+237) 696.469.637

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Commentaires

Christian ELONGUE
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Tu as déjà le syndrome de Douala hein :)
Cela démontre qu'il y'en a qui deviennent des voleurs malgré eux...
Ils n'éprouvent vraiment pas de plaisir à le faire mais les conditions de la vie les y contraint parfois...
Je ne veux pour autant encourager le banditisme ohh !

Ecclésiaste Deudjui
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Si la société prenait mieux soin de ses enfants au Cameroun, il y aurait très certainement moins de délinquants

Kratzke Scott
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Merci