12 février 2018

Le 11 février n’a jamais été la Fête de la Jeunesse…

Depuis exactement cinquante-deux éditions depuis le dimanche dernier, le régime de Ahidjo et ensuite de Biya nous ont leurrés qu’il existait une Fête nationale de la Jeunesse ici au Cameroun. Et ils ont aussi réussi à nous faire accroire que ça se déroulait le 11 février…

 

défilé du 11 février à Fondjomekwet
Défilé du 11 février dans le petit village de Fondjomekwet, à l’Ouest du cameroun. Crédit: patrimoine-fondjomekwet.com /CC-BY

 

Il n’y a jamais eu de jeunesse au Cameroun

Du moins, je parle de notre époque. Parce que dans l’ancien Cameroun il y avait bien des Présidents de la République qui avaient 36 ans d’âge, des généraux 40, et des chefs d’entreprises qui venaient à peine de célébrer leur 25ème anniversaire…

Mais aujourd’hui il n’y a plus de jeunesse ! Puisque pour nous berner, on nous a dit menti que ça continuait jusqu’à soixante-dix-sept ans ! On te considère encore comme un bambin lorsque tu viens de traverser la quarantaine. On te fait croire que tu ne peux rien diriger si tu n’as pas encore atteint tes cinquante-cinq ans. On te désintéresse de la chose socio-politique. On te déresponsabilise avec les bières, et on te fait finalement penser que « L’avenir du Cameroun, eh beh ça ne concernera que les vieillards ! »

 

Il n’y a jamais eu de Fête de la Jeunesse

La vraie Fête de la Jeunesse, ça ne devait être la fiesta ! Ça devait être une occasion pour discuter avec nos enfants et pour préparer leur avenir dans les lendemains tortueux du Cameroun. Ça ne devait pas être une kermesse. Ça devait être la mise en valeur des quelques rares jeunes Camerounais qui réussissent à s’en sortir dans ce panorama capharnaümesque, et non la mise en exergue de plusieurs folklores universitaires et scolaires.

Puisque depuis ma naissance, on ne m’a jamais présenté une jeunesse qui devait me servir de modèle ou bien d’exemple. On a même détruit celle qui devait nous servir de référentiel comme les Samuel Eto’o ou bien les Charles Ateba Eyené. On a plutôt toujours donné la parole à des gérontocrates. On a toujours organisé des défilés qui font en réalité la propagande des Partis uniques au Pouvoir. On a toujours pensé à faire la java, puisque la Fête de la Jeunesse n’est pas différente ici de nos anniversaires, de nos mariages, de nos baptêmes, de nos enterrements, de nos cérémonies de remise des vœux au chef de l’État, etc.

 

Ahmadou Ahidjo et Paul Biya
Le président Ahidjo (assis, en blanc) en compagnie de son Premier ministre Paul Biya (à sa droite), ont institué puis consolidé la fête de la jeunesse. Source: betatinz.com /CC0

 

Il n’y a jamais eu de bons discours pour la jeunesse

Je parle des discours-fleuves de notre chef de l’État. Je parle des discours de Monsieur Paul Biya qui vient de lire son 36ème « message à l’endroit de notre jeunesse ». Parce que non seulement ses allocutions sont insipides, mais en plus elles sont toujours froides et fades. Les discours de Paul Biya sont prévisibles et on peut même déjà les pré-deviner à l’avance. Ils sont généralement cyniques. Parce que si tu aimes tes enfants comme mon père nous avait aimés quand on était encore tout petits, tu ne vas pas leur demander de se lancer dans le bendskin ni le call-box. Tu ne vas pas leur demander de cultiver la résilience. Tu ne vas pas les envoyer dans l’agriculture sans aucuns moyens. Tu ne vas pas les laisser se pervertir dans les bars et dans les auberges et dans les jeux de hasard. Tu ne vas pas les abandonner dans la débrouillardise et dans le banditisme.

Parce que si Biya aimait vraiment sa jeunesse comme il le prétend devant les caméras, il n’allait plus nous embrouiller avec son émergence de 2035 ni avec ses mêmes-mêmes promesses qu’il nous rabâche depuis le 11 février de 1983. Et il allait aussi commencer à partager son Pouvoir avec notre jeunesse…

 

Il n’y a aucune date historique pour la Fête de la Jeunesse

Le plus dramatique, c’est que les jeunes Camerounais ne connaissent pas leur histoire. Puisque le Cameroun avait obtenu son Indépendance le 1er janvier 1960, et que Monsieur Ahmadou Ahidjo en était devenu le 1er Président à l’âge de 36 ans seulement. Ensuite il y avait eu le référendum dans la partie britannique du Cameroun, le 11 février 1961. Les Anglophones du Nord, musulmans, avaient préféré rejoindre le Nigeria. Mais les Anglophones du Sud (Southern Cameroons) avaient rallié les Francophones dans ce qui deviendra La « République fédérale du Cameroun », le 1er octobre 1961.

En 1967, Ahidjo décida que le 11 février deviendrait désormais la Fête de la Jeunesse ici au Cameroun. Puis le 20 mai 1972, il proclama la « République Unie du Cameroun » et il fit adopter une nouvelle Constitution après un suffrage référendaire. Il céda son Pouvoir le 06 novembre 1982 à son Premier ministre Paul Biya, et il mourut à Dakar (Sénégal) en 1989 alors qu’il n’avait plus jamais remis les pieds au Cameroun depuis le mardi 19 juillet 1983…

 

les leaders nationalistes de l'UPC assassinés
Ces grands leaders nationalistes ont sacrifié leur jeunesse pour le Cameroun. Source: afrikblog.com /illustration reproduite avec l’aimable autorisation de ses concepteurs

 

Le 11 février n’a jamais été la Fête de la Jeunesse au Cameroun…

Donc depuis le samedi 11 février 1967 qui ne représente aucune référence historique pour le Cameroun, le Président Ahidjo nous avait imposé « sa » Fête de la Jeunesse. Puis Biya nous a menti que nous sommes le « fer de lance » de notre Nation. Et ils ont aussi réussi à nous faire accroire qu’il restait 364 jours pour célébrer avec eux la vraie Fête de la Vieillesse…

 

Le 11 février n’est pas la Fête de la Jeunesse, puisque qu’il n’y a pas assez de jeunes à la Présidence, à la Primature, à la Défense, à la Direction générale de nos entreprises étatiques ni à la supervision de notre éducation, de notre sport et de notre culture.

Le 11 février n’a jamais été notre fête, puisque 50% des Camerounais ont moins de vingt ans et pourtant 85% de nos dirigeants ont plus de 77 ans !

Le 11 février ne deviendra jamais une fête pour la jeunesse camerounaise, tant que vous ne réfléchirez pas sur le profil-type de nos futurs Camerounais de demain.

 

Parce que dans l’ancienne époque après la colonisation, il y avait des Présidents de la République qui pouvaient avoir 36 ans d’âge, des députés 35, et des nationalistes qui avaient combattu pour le Cameroun depuis l’âge de 21 ans seulement : Ernest Ouandié, Félix Moumié, Ruben Um Nyobè, Osendé Afana, Gabriel Tabeu, Raphaël Fotsing et plusieurs autres encore.

Et c’est pour ça que si nous voulons vraiment retrouver le contrôle de notre pays, il faudra d’abord que les jeunes camerounais s’inscrivent massivement, mais alors très-très massivement sur les listes électorales comme mon ami Pierre La Paix Ndamè.

Et ensuite nous verrons si ces gens-là seront encore capables de nous subtiliser notre jeunesse.

 

Ecclésiaste DEUDJUI, je ne fête pas le 11 février

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Commentaires

Paul Xenon
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Merci pour cette belle réflexion sur la fête de la jeunesse dans notre pays... Dieu te bénisse

Paul