11 mai 2020

Testament

Les épidémiologistes pensent que si on ne trouve pas de vaccin d’ici peu, 80 % de la population mondiale sera tôt ou tard contaminée par le coronavirus. Et donc c’est l’occasion pour nous de préparer déjà notre testament…

La jeune fille et la mort, peinture de Henri Eisenberg
La jeune fille et la mort, peinture de l’artiste Henri Eisenberg (1987). Elle nous rappelle que notre vie peut disparaître à tout moment. Source: galerie-com.com /CC

J’ai peur de mourir !

Je suis un mortel, et je le sais. Mais la perspective d’un trépas imminent ne me réjouit pas plus que d’habitude. Surtout que je suis un hypocondriaque, et que je suis surtout effrayé par l’éventualité d’une disparition plus ou moins douloureuse voire même insupportable…
Le coronavirus me fait un peu sérieusement peur, en quelque sorte. Puisqu’il me fait imaginer une issue plus prématurée que celle que j’avais intermittemment envisagée. Puisqu’il me fait penser à notre mort. Puisqu’il cherche à déconstruire tous mes biais d’optimisme que j’avais pourtant mis longtemps à échafauder. Et puisque chacun d’entre nous est bien conscient qu’il devra forcément mourir un jour ou l’autre, mais paradoxalement nous souhaitons que cela se produise le plus tardivement et surtout le plus imprévisiblement possible.


J’ai peur de perdre des proches

C’est aussi l’autre inquiétude qui me rend suffisamment anxieux ces derniers jours. Parce que même si par extraordinaire je réussissais à survivre à cette pandémie, je suis bien effrayé de devoir être séparé –pour toujours !– de certaines personnes que j’aime très fort et qui me sont résolument irremplaçables.
Je pense ainsi aux membres de ma famille. Je pense aussi à mes anciens meilleurs amis. Je pense également à ces nombreuses Camerounaises qui me fascinent et que je révère. Et je pense enfin aux personnalités publiques, aux hommes célèbres, aux femmes politiques, aux grands sportifs, aux gens de culture, etc. Et je me dis que l’Humanité ne serait plus jamais la même si l’un seul d’entre vous, je dis bien l’un seul,  venait à nous abandonner à cause de ce vilain petit coronavirus…

portrait Kobe Bryant
Dessin mural de Kobe Bryant et sa fille qui nous ont brusquement quittés en début d’année 2020. Source: discoverlosangeles.com /Image reprise sous autorisation

Êtes-vous prêts à partir ?

Moi, non ! Et vous ? Est-ce que vous êtes déjà prêts à nous dire au revoir ? Est-ce que ça vous tenterait d’être diagnostiqué positif au covid-19 un vendredi soir, et puis de trépasser le lundi de la semaine qui va suivre ?
Moi, non !
Parce que le drame avec cette épidémie funeste, c’est qu’elle ne vous donnera même pas le temps de dire adieu aux réelles personnes qui vous sont très chères. Elle ne vous permettra pas de bien organiser vos affaires et de vous en aller ensuite en toute tranquillité. Elle ne permettra même pas à votre entourage de pouvoir bien organiser votre enterrement, pour cause d’extrême contagiosité post-mortem paraît-il…
Alors dans ces conditions scandaleuses, je présume que vous n’êtes pas encore prêts à partir. Y compris les personnes les plus stoïques et les plus flegmatiques comme mon ancien meilleur ami Pierre La Paix Ndamè. Parce que dans chaque existence, dans toute vie et dans toute la longue Histoire de l’Humanité, il faut au moins préserver l’opportunité de rendre hommage à l’esprit de la personne qui vient de disparaître. Et rien que pour nos obsèques, je pense que ce ne serait pas vraiment une super bonne idée de perdre sa vie pendant ces moments-ci.


Qu’allons-nous laisser au Cameroun ?

Quelle serait votre trace si jamais le coronavirus venait à vous emporter tout de suite ? Hein ? Quel serait votre héritage ? Quelle aura été votre contribution et votre coefficient d’utilité au sein de notre société ? Quels seront donc vos legs, vos faits historiques, vos ouvrages, vos dons, vos œuvres artistiques et professionnelles, vos exploits, vos références, vos camerounaiseries ?
Parce que c’est tout ceci qui comptera en réalité, au final. C’est de savoir quel sera l’impact que vous aurez laissé dans la mémoire collective à la suite de votre disparition. Est-ce que vous aurez fait de bonnes choses, ou alors des choses mauvaises ? Est-ce que les Camerounais se souviendront-ils encore de tous vos récits dans le futur ? Est-ce que vos travaux et vos réalisations persisteront-ils dans le temps ? Est-ce que vous entrerez dans la légende et dans le panthéon de nos prochains manuels d’histoire ? Est-ce que vous êtes prêts à vous laisser assujettir par cet insaisissable minuscule coronavirus, alors que vous n’avez même pas encore commencé à préparer ne serait-ce que le quart de votre testament ?

Flora Zé
La presse camerounaise rendu hommage à Flora Zé le week-end dernier, lors de son inhumation. Source: Facebook /CC

Testaments

Donc selon certains épidémiologistes, 80 % de la population camerounaise sera contaminée par le coronavirus si on ne trouve pas un médicament rapidement. Et donc c’est déjà l’occasion pour vous de commencer à consigner votre testament…

Testament ! Avez-vous déjà fait le bilan de votre existence ? Avez-vous déjà mesuré ce que vous avez réalisé ? Avez-vous déjà évalué l’utilité de votre conduite auprès de la communauté des Camerounais et des Camerounaises qui vous entourent ?
Testament ! Si vous êtes le propriétaire d’un patrimoine non négligeable, ne serait-il pas intelligent de commencer à y réfléchir suffisamment dès à présent ?
Testament ! Les précautions que je recommande ne concernent pas seulement notre postérité, mais il s’agit d’établir une véritable introspection en s’interrogeant profondément sur nous-mêmes.

Parce que grâce ou bien à cause de cet insaisissable méchant coronavirus, j’ai déjà commencé à me replier sur moi-même depuis le début de ce confinement. J’ai constaté que j’avais réellement peur de mourir d’une manière aussi fulgurante. J’ai appréhendé la disparition des personnalités qui me sont chères. Je me suis demandé ce que j’allais véritablement léguer aux futures générations qui allaient me suivre, et en particulier qu’est-ce que j’avais déjà concrètement réalisé pour mon merveilleux pays le Cameroun ?
Et c’est là que j’ai compris qu’il fallait déjà que je rédige mon testament.


Ecclésiaste DEUDJUI, je prépare mes dernières volontés.
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Commentaires

Magne
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Pourquoi penser au testament plutôt qu aux différents tradipratiens et naturopathes qui sont nombreux aujourd'hui à trouver le traitement du covid 19 au Cameroun.

Ecclésiaste Deudjui
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le testament c'est juste au cas où...mais évidemment que nous devons d'abord compter sur notre pharmacopée et médecine traditionnelle.

mareklloyd
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Comme toi, je pense aussi beaucoup à mes proches... Mais bon, l'optimisme reste de mise!!!

Ecclésiaste Deudjui
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Nous sommes obligés de rester optimistes...