Alain Mabanckou: apologie de son crack
Je ne suis pas Platon et Mabanckou n’est pas Socrate. Mais je voulais quand même vous dire (en deux mots) ce que je pense de ce génie littéraire…
L’autre jour j’ai fini de (re)lire Verre Cassé pour la 7ème fois, et, au vu du plaisir que je ressens à chaque fois, je me suis dit qu’il fallait absolument que je partage le talent de son auteur, Alain Mabanckou.
Avant de revenir sur le fameux Verre Cassé, je rappelle que Mabanckou est l’auteur de plusieurs autres livres à succès, à savoir « Demain j’aurai vingt ans », « Black Bazar », « African Psycho », « Mémoires de Porc-épic », « Le sanglot de l’homme Noir ». Avec un point commun au travers de toutes ces œuvres, le non-respect du conformisme et des règles grammaticales…
Pour donner une idée, Mémoires de porc-épic a remporté le Prix Renaudot en 2006 alors que le texte est écrit uniquement avec la virgule, que les paragraphes sont interminables, et que les premières lettres de chaque phrase sont tout le temps en minuscule…
Ce procédé avait déjà fait recette dans Verre Cassé en 2005, best-seller, livre qui relate les mésaventures d’un bar, Le Crédit a Voyagé, au travers du personnage ubuesque de Verre Cassé, soûlard invétéré, irresponsable matrimonial et mauvais enseignant, auprès de qui les clients du bar racontent leurs galères quotidiennes ainsi que leurs caractères lubriques et excentriques.
Dans Black Bazar, c’est la négritude parisienne que Mabanckou passe au peigne fin, décrivant au passage la vie artificielle des Africains de l’Hexagone.
Tout le contraire de African Psycho et Demain j’aurai vingt ans, deux romans qui se passent en Afrique villageoise et dans lequel le personnage central affiche une fausse naïveté qui fait merveille. Dans le 1er il s’agit dune parodie de American psycho (Bret Easton Ellis) version bantou-isée, et dans le second l’auteur nous offre une plongée au cœur de son enfance intime, sa mère qui l’a élevée toute seule, son père adoptif qui le considérait comme son propre fils…
Nul doute que ce Mabanckou-là est un génie. Sinon comment expliquer les centaines de références qu’il évoque à chacun de ses romans, et qui dévoilent sa culture générale intarissable ? Comment expliquer que son personnage principal puisse être un porc-épic, et que malgré tout on y croit quand il nous plonge dans les méandres du totémisme des traditions subsahariennes ? Comment comprendre qu’il écrive tout un livre, Verre Cassé, avec seulement la virgule comme signe de ponctuation ? Et que, dedans ce cafouillis de verbiage, on y retrouve la vie, le désordre, l’Afrique, l’amour, la joie, le bonheur, avec l’intertextualité pour nous saupoudrer tout ça ?
Et puis aussi, tous ses livres sont dédicacés à sa propre mère, Pauline Kengué, disparue depuis 1995. Ma maman aussi se prénomme Pauline. Mais ce n’est pas (seulement) pour ça que je trouve cet écrivain vraiment (très) exceptionnel…
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