1 juillet 2019

Comprendre l’arrestation de Maurice Kamto

Cela fait cinq mois exactement que Maurice Kamto a été incarcéré dans la prison centrale de Kondengui. Et cette arrestation ne fait que soulever de nombreuses interrogations.

 

protestation contre l'arrestation de Maurice Kamto
Les militants du MRC en pleine protestation devant une cathédrale à Yaoundé. Image:_ agora-mag.net /Photo reproduite sous autorisation

 

Qui est Maurice Kamto ?

Maurice Kamto est un juriste de renommée et de réputation mondiales, né le 15 février 1954. Il a servi comme ministre délégué à la justice pendant sept ans, de 2004 à 2011 (il avait démissionné avant un remaniement). Il s’est notamment fait remarquer lors de la rétrocession de Bakassi à l’État camerounais, puisqu’il était en première ligne lors des négociations devant les juridictions internationales.

Cependant, c’est en créant son parti le MRC (Mouvement pour la Renaissance du Cameroun) que Maurice Kamto s’est érigé en égérie politique camerounaise, et depuis lors il se revendique comme étant le leader indiscutable de l’opposition. Il est d’ailleurs arrivé en deuxième position derrière Paul Biya, lors de la dernière consultation présidentielle qui a eu lieu ici au Cameroun le 7 octobre 2018.

 

Pourquoi l’a-t-on arrêté ?

À mon avis il n’avait jamais été question de le faire arrêter (c’est aussi l’avis de Pierre La Paix Ndamè). Parce que quoi qu’on dise, et même si Kamto s’est revendiqué vainqueur du scrutin présidentiel, il n’est jamais judicieux pour un régime en place de se faire remarquer par les arrestations de ses contestataires.

Mais. Maurice Kamto a osé franchir le Rubicon : une marche interdite, puis une autre marche interdite, puis une autre marche interdite encore. Et surtout que ces marches interdites-là avaient pour objectif de contester la « victoire volée » du président Paul Biya, et de mettre ainsi en branle sa légitimité. Ces marches interdites ont connu des débordements dans les représentations diplomatiques camerounaises à l’étranger, notamment à Berlin et à Paris. Et ce sont ces casses-là qui ont été la goutte d’eau qui a fait déborder le vase. Sans oublier que Maurice Kamto s’est fait entourer par des faucons (Penda Ekoka, Célestin Djamen, Albert Dzongang, Valsero, Paul-Éric Kingué) qui ne rêvent que de la violence, et qui pensent qu’il faut semer la zizanie et le désordre en instiguant un mouvement de rébellion généralisée…

 

Paul Biya en train de votre lors de la présidentielle du 7 octobre 2018
Le président Paul Biya en train de voter lors du dernier scrutin présidentiel. Source: afriqueeducation.com /Image reproduite sous autorisation

 

Va-t-on le libérer ?

À mon avis, pas du tout ! Car Maurice Kamto est devenu beaucoup plus « dangereux » après son arrestation qu’avant son arrestation. Il est devenu plus « important » surtout. Il a été involontairement transformé en martyr. Et sa libération risquera de faire de lui un Nelson Mandela à la camerounaise, ce qui ne serait pas du tout du goût de notre chef de l’État taciturne.

Non. Maurice Kamto fera probablement encore de longs séjours derrière les barreaux, sauf si la communauté internationale France se mettait à accentuer la pression pour sa libération. Car Paul Biya est réputé pour être un monstre froid, sans émotion et sans états d’âme. Il l’a déjà démontré à plusieurs reprises en laissant pourrir ses propres collaborateurs en prison pendant des décennies, à l’exemple de Titus Edzoa qui a passé dix-sept ans au cachot alors qu’il avait pourtant été le médecin personnel de son futur tortionnaire…

 

Qui profitera de ce crime ?

Personne ! Car de jours en jours le MRC ne fait que se radicaliser même s’il s’effrite, et de jours en jours le Cameroun ne fait que se subdiviser en sardinards contre les tontinards.

Personne ne profitera de ce crime. Surtout pas le gouvernement du RDPC, qui n’avait mais alors pas du tout besoin de ce caillou à l’aspect tribalistique dans sa chaussure. Et comme j’ai dit, si Kamto est libéré, il deviendra incontestablement un héros, et s’il reste en prison il continuera de constituer une véritable menace pour la stabilité de notre Cameroun.

 

Que faire alors ?

Parce que si moi j’étais à la place de monsieur Paul Biya, j’allais faire ce qu’il aurait dû faire depuis le début avec les anglophones, avant que la crise du Nord-Ouest-Sud-Ouest ne dégénère. C’est-à-dire que j’allais appeler Maurice Kamto et j’allais le faire assoir devant une table ronde, puis j’allais lui demander de me détailler tranquillement chacune de ses revendications.

 

Maurice Kamto s'adressant à la nation camerounaise
Maurice Kamto s’adressant à la nation en tant que chef de l’Etat élu, puisqu’il continue de contester la victoire du RDPC. Source: ocameroun.info /CC0

 

Comment comprendre l’arrestation de Maurice Kamto ?

Donc cela fait cinq mois exactement que Maurice Kamto a été embastillé dans la prison centrale de Nkondengui. Et pourtant cette arrestation n’arrête pas de soulever de nombreuses interrogations.

 

Comprendre l’arrestation de Maurice Kamto, c’est se demander si c’est normal dans une République qui se veut démocratique, de faire incarcérer la personnalité qui symbolise le leadership de l’opposition.

Comprendre l’arrestation de Maurice Kamto, c’est aussi chercher à comprendre pourquoi le MRC a basé toute sa stratégie sur la déstabilisation et la violence.

Comprendre l’emprisonnement et l’incarcération d’un juriste de renommée intercontinentale comme Maurice Kamto, c’est surtout s’inquiéter pour l’avenir politique du Cameroun qui s’annonce des plus inquiétants.

 

Parce que depuis le 28 janvier 2019 et cette arrestation en grandes pompes, c’est presque l’équilibre du Cameroun qui est sur le point de basculer à tout moment. C’est toute notre stabilité qui est remise en cause. C’est tout le peuple camerounais qui est en train de s’inquiéter et de s’interroger au jour le jour, puisque certains ont même déjà commencé à me demander en tremblotant que « Je dis hein, Ecclésiaste ! Est-ce que tu comprends même exactement pourquoi est-ce qu’ils avaient fait arrêter Maurice Kamto ? »

 

Ecclésiaste DEUDJUI, il faut plutôt comprendre Paul Biya

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Commentaires

Kok Brandon-Brad
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Une des description les plus biaisées que j'ai eu à lire sur la période post électorale au Cameroun.. Tant de partialité face à un sujet aussi sensible autant pour les observateurs politiques que pour la société civile c'est vraiment rétrograde pour ce pays.
"Sans oublier que Maurice Kamto s’est fait entourer par des 'faucons' (Penda Ekoka, Célestin Djamen, Albert Dzongang, Valsero, Paul-Éric Kingué) qui ne rêvent que de la violence, et qui pensent qu’il faut semer la zizanie et le désordre en instiguant un mouvement de rébellion généralisée…" vous êtes fous d'écrire ce genre de bêtises sans scrupule pour l'honneur de ces messieurs, qui quelque soit l'issue de leur combat, ont montré même bien avant ces élections leur attachement à ce pays. Le pire c'est d'omettre d'évoquer la disproportion entre l'interdiction des marches manifestement inoffensives pour la tranquillité publique et leur répression. Les régimes vraiment soucieux de la sécurité publique encadrent les marches

Ecclésiaste Deudjui
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Bonjour Brandon, contrairement à ta perception de cet article, celui-ci n'a nullement été rédigé avec la moindre partialité. Autant j'ai fustigé le caractère radical de certains MRCistes, autant j'ai soulevé le caractère rancunier du président de la République et mon désaccord quant à l'interdiction des marches pacifiques. On n'est pas toujours obligé de voir le monde en blanc ou en noir, ce qui signifie qu'on n'est pas forcément obligé de faire partie dun camp ou bien de l'autre. Cordialement.

paul aimé
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bon article

Ecclésiaste Deudjui
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Merci pour la visite :-)