Mais que vaut la vie camerounaise ?
Je suis encore sous le choc du décès de notre compatriote en Algérie, le footballeur Albert Ebossè. Aux dernières nouvelles, la FIFA serait très émue de ce drame qu’a subi le football international. La CAF aurait d’ailleurs décidé de frapper fort, et de condamner sévèrement toute forme de vandalisme dans les stades. En sus, la fédération algérienne de football aurait décidé d’accorder une indemnité de 100.000 dollars (environ 50 millions de FCFA) à la famille du défunt, en plus de faire percevoir à celle-ci l’intégralité du salaire du joueur tout au long de la durée restante de son contrat…
Mais ce n’est pas tout ça qui m’intéresse.
Qu’ont dit les autorités camerounaises de ce drame ? Qu’a fait le ministère (clandestin) des sports ? Où sont passées les SYNAFOC (syndicat national des footballeurs camerounais) et autres associations de protection des droits des joueurs ? Que va faire le comité provisoire de (a)normalisation ?
Les uns passent le temps à se positionner pour la présidence de la FECAFOOD (fédération camerounaise de nourriture), les autres à proroger leur mandat à la tête de certaines commissions, et au final personne ne s’intéresse au sort du pauvre footballeur décédé sur la pelouse de Tizi Ozou…
Nous qui aimons trop prendre les exemples chez les étrangers, pourquoi on ne prend jamais l’exemple de leur communautarisme, de leur nationalisme, de leur chauvinisme, de leur altruisme ? Pourquoi on ne remarque jamais leur sollicitude lorsqu’un Américain est pris en otage, ou lorsqu’un journaliste Français est retenu prisonnier au Mali, en Syrie, en Afghanistan ? Ou décapité en Algérie ? Pourquoi on n’imite pas les Espagnols et les Russes qui demandent des enquêtes claires et nettes, chaque fois qu’un quelconque de leurs ressortissants est concerné par un crash d’avion ? Pourquoi on ne fait pas comme les Anglais, qui conseillent à leurs compatriotes de ne pas voyager vers les pays atteints d’une épidémie ? Ou comme les Allemands, qui regroupent tous les Germaniques pour les évacuer d’un pays en train d’entrer en situation de crise ? Pourquoi on ne fait pas comme Tsahal, l’armée israélienne, qui a pour devise : « Israël ne laisse jamais personne derrière » ?
Chez nous c’est le silence, chez nous c’est le je-m’en-foutisme, chez nous on continue comme si de rien n’était. Chez nous le Président de la République n’a rien à dire sur la vie d’un Camerounais. Ça ne l’émeut en aucune manière. Chez nous, même si tu es Charles Ateba Eyéné, on rafistole ton enterrement et on passe à autre chose.
POURQUOI NOTRE VIE EST-ELLE SI NÉGLIGEABLE ?
Pourquoi est-ce que nos autorités nous font ça, hein ? Pourquoi est-ce qu’on nous donne l’impression que nous sommes des étrangers sur notre propre territoire ? Que tout ce que nous abattons ici sur terre, ça ne sert à rien ? Que la nationalité que nous avons, ça ne nous apporte que des tracasseries et de l’indifférence ? Pourquoi est-ce qu’on nous donne l’impression que nous sommes des orphelins de notre Nation ? Qu’un Sénégalais peut te mettre en prison dans ton propre pays, quand bien même c’est toi qui aurais raison ?
A quoi nous servent nos ambassades à l’étranger ? Pourquoi est-ce qu’elles ne disent rien, quand on expulse les Camerounais de la Guinée Equatoriale, manu militari ?
Il y a trois mois on a appris qu’un compatriote avait été assassiné en pleine rue, en Chine. Rien. Après cela il y a eu le décès tragique de notre jeune humoriste, Koulibaly System. Encore rien. Et puis, on a vu comment Abega Théophile est parti dans l’indifférence, de même que Louis-Paul Mfédé. On a vu comment Jean-Miché Kankan n’est pas honoré dans son propre territoire. On voit comment nos jeunes frères se meurent dans le désert du Sahara, lorsqu’ils partent dans ce qu’ils appellent « l’Aventure »…
Albert Ebossè, moi je te dis R.I.P (rest in peace, repose en paix). Je te dis de ne pas regarder notre gouvernement, on est habitués à son apathie. Tu es parti te battre en Algérie parce que le pays-ci est dur. Ici on ne te proposait rien, comme on ne propose jamais rien à personne. Même à nos soldats on ne propose rien, pourtant ce sont eux qui nous protègent contre Boko Haram ou contre la crise centrafricaine.
Je comprends maintenant pourquoi beaucoup de « frères » changent de nationalité, lorsqu’ils réussissent à sortir de ce foutu Triangle. Mais je n’ai toujours pas la réponse à ma question : « Que vaut au juste la vie camerounaise ?… »
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